Chronologie

2019 Bruxelles - texte panneau 2

 
Poème pour un vitrail 
Un mythe,
Le bleu de Chartres,
Une idée du bleu,
La couleur perdue.
 
Le bleu de la mélancolie, de la saudade,
Sur la gravure de Dürer un volume,
Un ego en cristal.
Mes rêveries m’ont emmené au-delà de l'océan bleu outremer.
 
Écriture-peinture.
Les mots m’ont sauvé,
Des mots crus, écrits et lus partent au-delà de l’horizon.
Horizon mathématique, limite de la vue.
 
Les montagnes et les vallées des Appalaches dont le seul nom est un rêve
Sont là, devant moi, dans ce panorama sans fin.
La terrasse flotte au-dessus d’une ravine, 
Les oiseaux planent à la hauteur des yeux, au-dessus de la canopée.
La peinture coule le long de l’adret et de l’ubac, 
Enfant, je marchais dans une vallée et rêvais de ces mots.
Le lac est chaud,
Il prend la couleur de la peinture qui se répand, un bleu outremer.
 
Les gargouilles suspendues en haut de la cathédrale veillent sur nous,
Les cyclopes nous surveillent,
Leurs yeux sont des globes noirs suspendus aux façades,
Pour eux les arbres sont coupés.
 
Frontière, un grand trait traverse la toile et le verre,
D’une tristesse soudaine,
Le verre se brise sous les tensions internes,
Je ne vois plus les couleurs d’hier, je suis aveugle.
Des femmes et des hommes pleurent aux frontières.
 
Une toile froissée, pliée, peinte, 
Crée des montagnes et des vallées,
La peinture coule le long des parois.
Image d’une toile pliée au centre d’un grand verre,
Relief contenu, texte caché, à moitié.
Le soleil rouge effleure les crêtes 
Le grand oiseau voit tout.
 
Un dessin se projette sur le verre-territoire,
Les lignes d’un jeu mathématique 
Se superposent et voici le vitrail.
 
Une toile se creuse en son centre,
La peinture coule, rivière elle cherche un chemin sans choisir,
Elle se répand et obéit aux lois de la pesanteur,
La toile pliée à celle des fractales.
Quelle est la loi de l'amour impossible ? 
L’entropie.
Aucune sagesse en ce désordre.
 
Didier Sancey, mai 2016